Communes et Région unis contre la pollution visuelle

C’est une des plaies de nos sociétés modernes : la publicité est omniprésente et comme si cela ne suffisait pas, elle se développe copieusement de manière anarchique et illégale le long des routes à fort trafic, dans les carrefours ou à l’entrée des agglomérations. Il est question ici des affiches et autres panneaux plus ou moins esthétiques qui se greffent sur les panneaux de signalisation, les feux tricolores, les murs et les clôtures sur lesquels ils s’éternisent parfois jusqu’à tomber en lambeaux ou gâcher le paysage.

Les élus locaux se sentent dépourvus face à cet envahissement publicitaire : « Nous ne parlons pas ici des installations en dur qui doivent normalement faire l’objet d’un permis, mais bien de ces affiches posées à la va-vite, depuis la vente d’un immeuble jusqu’au passage d’un cirque, sans oublier toutes les festivités locales, explique Patrick Lecerf (MR), bourgmestre empêché de Hamoir. C’est une véritable nuisance contre laquelle je mène la guerre. Mais il est souvent compliqué de trouver un responsable à sanctionner. Reste qu’au bout du compte, cela implique souvent une intervention des services communaux pour décrocher ces panneaux ou nettoyer la chaussée. »

Mais le problème n’est pas uniquement esthétique. Il y va surtout de la sécurité des usagers de la route. Selon Patrick Lecerf, l’affichage sauvage entrave souvent

la circulation des piétons sur les trottoirs, songeons aux mamans avec des poussettes. Souvent, il perturbe aussi la visibilité à des endroits stratégiques, comme les carrefours dangereux où la moindre perturbation peut tourner à la catastrophe. En effet, ils peuvent être sources de distraction pour les conducteurs.

A l’entrée des agglomérations ou à hauteur de carrefours stratégiques, les publicités prennent la plupart du temps racine sur le domaine public régional. L’occupation de celui-ci est régie actuellement par le décret du 19 mars 2009. Celui-ci prévoit une autorisation de la Région pour l’utilisation de ces voiries et de leurs abords « d’une manière excédant le droit d’usage ordinaire qui appartient à tous. » Les poseurs d’affiches qui nous concernent ici ne sont pas très sensibles à cette disposition, c’est une évidence.

Les sanctions existent, mais elles sont rarement appliquées. L’amende peut aller jusqu’à 1.000 euros pour « ceux qui apposent des inscriptions, des affiches, des reproductions picturales ou photographiques, des tracts ou des papillons sur le domaine public régional à des endroits autres que ceux autorisés par l’autorité gestionnaire. »

En Wallonie, la réflexion est en cours entre l’administration régionale et les pouvoirs locaux pour tenter de lutter plus efficacement contre ce phénomène de pollution visuelle qui n’est manifestement pas sous contrôle. Plusieurs pistes avaient été envisagées, mais l’une d’entre elles semble faire consensus après plusieurs réunions en ce début d’année.

En bref et même si les voiries concernées sont très souvent régionales, les villes et communes seraient associées au processus d’autorisation et de sanction en cas d’infraction. Les endroits où ce type d’affichage est permis seraient strictement limités : « Il s’agirait d’identifier, en concertation avec les communes, des zones localisées le long des voiries régionales où l’affichage serait autorisé et géré dans le respect des règles de sécurité de l’infrastructure routière. En dehors de ces zones, aucun affichage ne serait toléré », a expliqué le ministre Carlo Di Antonio (CDH) au parlement de Wallonie.

Sur ces secteurs, les communes auraient la possibilité de percevoir des redevances ou de sanctionner les infractions, ce qui financerait la gestion et l’entretien de ces espaces. Ce dernier point soulève toutefois une question de droit : selon le décret de 2009, le domaine public régional en matière de voirie est de la compétence exclusive de la Région. Il faut donc modifier le texte, mais le ministre se montre confiant : « Par une uniformisation des pratiques et un cadre clarifié, il sera possible d’offrir une meilleure lisibilité de l’espace public et de mettre un terme a l’affichage publicitaire sauvage le long des voiries régionales. »

Source: ERIC DEFFET/Le Soir