Accord sur le photovoltaïque wallon!

Le ministre wallon de l’Energie, Jean-Luc Crucke (MR), l’avait promis avant la trêve estivale. Il aura finalement fallu attendre la mi-septembre pour que la majorité MR-cdH au gouvernement wallon parvienne à dégager un accord permettant d’en finir avec la bulle du photovoltaïque au sud du pays.

 

  1. Des promesses tenues

Pour rappel, la déclaration de politique régionale prévoit une révision du mécanisme de soutien à la production d’électricité verte avec pour triple objectif l’optimalisation de la production, la maîtrise des coûts sociétaux et environnementaux et la restauration de la confiance des investisseurs. Parallèlement, le Gouvernement s’engageait à étudier et résoudre rapidement le conflit entourant la réduction du facteur k concernant les installations Solwatt et à trouver une solution pérenne à la dette des certificats verts (CV).

 

Par ces avant-projets de décret et d’AGW adoptés en 1ère lecture, le Gouvernement wallon propose une réponse simple, juste, globale et définitive à la problématique des CV. Les promesses sont tenues :

–        Une solution innovante.

–        Aucune taxe ou augmentation de facture pour les Wallons.

–        Une réponse simple et définitive à la dette issue de la « bulle des CV ».

–        Le maintien du mécanisme des CV avec une modification du taux d’octroi.

–        Concernant Solwatt, une proposition de transaction judiciaire pour les 11.000 recours au civil et le traitement des dossiers introduits à la Cwape (atteinte de la rentabilité).

 

 

  1. Une situation intenable

Le déséquilibre constant entre l’offre et la demande a faussé le marché et a créé ce que l’on a communément appelé la « bulle des certificats verts ». Selon les chiffres de la CWaPE, sur la période 2003-2017, toutes filières confondues, près de 58.643.000 CV ont été octroyés et seuls 35.480.000 CV ont été valorisés sur les marchés. Les millions d’autres CV ont dû être achetés par ELIA au prix minimum garanti de 65 € HTVA.

Les coûts de ces mécanismes ont, eux aussi, explosés : ils sont passés de 59 millions en 2003 à 550 millions en 2017, ce qui représente plus de 4,3 milliards cumulés.

  1. Des réponses nécessaires

En octobre 2017, le Gouvernement a mis en place une Task-Force avec la mission d’établir des pistes de solutions structurelles et durables quant aux surplus des CV sur le marché. Le Gouvernement, qui a pris acte de ce rapport en mai 2018, a ensuite sollicité l’avis de la CWaPE sur les conclusions de celui-ci, avis qui a été rendu début juillet. Il a également été demandé au Ministre de l’Energie de proposer diverses pistes de solution de financement pour, enfin, trouver une solution équilibrée à cette problématique.

En accord avec les objectifs fixés dans la DPR, le Ministre de l’Energie a proposé une approche globale et des solutions à long terme pour l’avenir des CV, le facteur k Solwatt, la fixation des quotas au-delà de 2024 et le financement de la dette CV.

3.1  Opération de financement de la dette des certificats verts

Le déséquilibre entre offre et demande sur le marché des CV a plusieurs fois été atténué par des opérations de portage et de temporisation qui ont permis de racheter l’excédent de CV mais pas de les annuler.

Ces mesures n’ont jamais apporté de solutions pérennes.

En 2017, le Gouvernement wallon a dû lancer en urgence une opération de temporisation via la trésorerie wallonne. Ce système avait atteint ses limites et ne faisait que reporter l’échéance. Le Gouvernement wallon a donc chargé le Ministre de l’Energie de lancer une consultation des marchés financiers pour trouver un financement adéquat. Dans le cadre de cet appel bancaire, plusieurs critères étaient demandés :

–        Une structure indépendante des pouvoirs publics.

–        Une structure qui ne sera ni garantie, ni financée par la Région wallonne.

–        Aucune garantie ou recours ne pourra avoir lieu sur le GRTL (Gestionnaire de réseau de transport local, Elia);

–        L’opération ne doit pas alourdir la facture du consommateur final et doit respecter la surcharge d’Elia actuellement en vigueur de 13,8159 €/MWh.

Trois offres ont été reçues et sur base des critères fixés, une seule a été retenue.

BNP Paribas Fortis propose de structurer un mécanisme de financement par lequel ELIA recevrait le produit d’une ou plusieurs émissions obligataires avec un label « vert » pour lui assurer annuellement les moyens financiers nécessaires à l’acquisition future des CV wallons, ainsi qu’au rachat à terme des CV wallons précédemment mis en réserve et en temporisation.

Le modèle utilise la surcharge existante (aujourd’hui de 13,8159 €/MWh) afin de couvrir tous les coûts liés au financement des certificats verts (frais de mise en place, frais annuels de la société émettrice et rémunération des investisseurs).

Afin de lever les fonds nécessaires, le montant indicatif de la surcharge s’élèvera à 7,58 €/MWh (à la place des 13,8159 € et cumulé sur la période). Ce modèle permet de soulager la pression sur la facture des consommateurs mais également des entreprises qui souffrent de la compétitivité.

3.2  Les certificats verts

Le mécanisme des CV sera maintenu pour les anciens et les nouveaux projets. Cette décision donne un signal fort de politique active et stable et inscrit clairement la Wallonie dans une volonté d’atteinte des objectifs énergétiques.

Les objectifs par filières 2020 et 2030 sont revus, notamment sur base des objectifs repris dans le PNEC (40 % d’électricité renouvelable à l’horizon 2030) :

Objectifs (GWh) 2016 2020 2030
Hydro 318 360 440
Eolien onshore 1.518 2.437 4.600
Photovoltaïque 798 1.184 3.300
Géothermie 0 0 40
Biomasse solide bois 1.409 1.190 1.310
Biogaz 202 230 301
Incinération 218 153 90
TOTAL 4.463 5.554 10.081
Consommation en électricité 25.944 27.320 27.134
Part d’énergie renouvelable 17,2 % 20,33 % 37,15 %

 

Le principe des enveloppes de CV sera donc maintenu afin de poursuivre le développement des énergies renouvelables à un coût sociétal maîtrisé. Les taux d’octroi seront, par conséquent, revus et la durée d’octroi se basera sur la durée de vie économique (selon la méthodologie de la CWaPE). Selon les filières, des diminutions entre 25% et 75% sont prévues à l’horizon 2030, ce qui amorce le phasing-out du soutien.

 

Filières

(toutes puissances confondues)

Taux d’octroi moyen (CV/MWh)

(calculé sur durée de vie économique)

 

Durée de vie économique

Hydro 0,80 25
Eolien (>100Kw) 0,60 20
Eolien (<100Kw) 1,20 20
Photovoltaïque (>100Kw) 0,9 20
Géothermie 2 25
Biomasse solide bois 2,5 15
Biogaz 2 15
Cogénération fossile 0,2 15

 

3.3  Fixation des quotas jusqu’en 2030

L’offre des CV sur le marché est largement supérieure aux quotas fixés. Les quotas vont donc être adaptés à l’évolution du marché des certificats verts et fixés jusque 2030 (et non plus 2024) afin de permettre plus de lisibilité et prévisibilité du marché des CV.

Selon les différents modèles étudiés, le marché des CV devrait être revenu à l’équilibre en 2025. Les détenteurs de CV pourraient, dès lors, valoriser leurs CV au-delà du prix minimum garanti de 65 euros HTVA.

3.4  Facteur k Solwatt

Cette question est essentielle pour rendre la confiance aux Wallons. Au fil des ans, les promesses ont fluctué et ont créé un réel déséquilibre entre ce qui était promis et ce qui était finalement perçu. Pour rappel, le droit d’obtenir des CV est limité à 15 ans pour toutes les unités de production d’énergie verte. Après une période d’octroi de certificats verts de 10 ans, le nombre de certificats verts octroyés pour la période restant à courir est réduit par application d’un facteur « k ».

Suite aux décisions prises par les anciens gouvernements, le facteur « k » est aujourd’hui fixé à 0, et ce uniquement pour les petites installations PV. Cette situation est donc contraire à ce qui avait été annoncé aux 80.000 familles concernées qui voyaient donc leurs CV limités à 10 ans. Il y a, à ce jour, 11.000 recours au civil contre la Région wallonne.

Et c’est justement cette procédure judiciaire qui bloque aujourd’hui toutes les solutions analysées par le Gouvernement wallon :

–        Nous ne pouvons pas changer les règles au milieu d’une procédure judiciaire, nous devons respecter la loi.

–        Toute proposition de résolution de la situation actuelle affaiblirait la Wallonie dans une procédure où elle est citée.

Néanmoins, nous allons respecter nos engagements d’apaisement.

Le Gouvernement charge le Ministre de l’Energie, pour autant que la mise en état judiciaire soit suspendue, de confier aux conseils de la Région, le mandat de rechercher une solution amiable au litige, sous réserve de tous droits et sans reconnaissance préjudiciable aucune. Le Ministre soumettra au Gouvernement, le cas échéant, un projet d’accord transactionnel négocié.

Concernant les dossiers introduits à la Cwape :

–        Pour rappel, les propriétaires de PV qui estiment avoir été lésés par le retour du facteur k à 0 pour les 5 dernières années, peuvent introduire un dossier auprès de la Cwape afin de démontrer leur manque de rentabilité.

–        Dans les faits, ce calcul s’avère laborieux et les dossiers sont suspendus.

–        Nous allons demander à la Cwape, sur base d’une nouvelle procédure proposée par le Gouvernement wallon, de traiter, dans les meilleurs délais, les demandes des particuliers qui souhaitent remettre leur facteur k à 100 (si le manque de rentabilité le justifie par rapport aux promesses initiales).